Ça me gratte : Lutte contre le téléchargement, il n’y a pas de gagnant !

Megaupload n’est plus disponible. Je ne veux pas commenter cette actualité mais rebondir dessus. En effet, cet évènement qui suscite beaucoup de réactions devrait être l’occasion de prendre du recul et de réfléchir aux décisions qui ont été prises ces dernières années. Deux choses doivent nous interpeller.

D’une part, le fait que l’émergence de ce type d’entreprises, qui s’enrichit sur le dos des créateurs, est en partie le résultat d’une lutte incessante de l’industrie culturelle contre le peer to peer. Et l’éviction de Megaupload  ne met fin à rien, elle laisse le champ libre à d’autres acteurs qui finiront bien par se manifester. On peut même penser que Megaupload sera remplacée par Megaupload….

D’autre part, le coût pour la collectivité de cette ineficace lutte contre le téléchargement. L’absence de résultat s’explique, en partie, par le fait qu’il n’y a pas de problème (il suffit de regarder chez nous l’excellente santé du cinéma, etc…) et que les effets du partage sont même plutôt positifs (de nombreuses études INDEPENDANTES le démontrent), bref je ne vais pas revenir sur des propos que j’ai maintes fois tenus (voir les liens ci-dessous)

Si l’industrie, les ayants droit et les pouvoirs publics étaient, sur ce sujet, un minimum sérieux ils accepteraient de faire un bilan de ces 10 dernières années, par exemple, en initiant une étude analysant les coûts et les gains pour la collectivité des politiques mises en place. Seraient alors mis dans la balance le développement du marché des produits culturels et l’évolution des revenus des artistes créateurs avec un certain nombre de coûts (couverts par l’industrie et les pouvoirs publics) :

  1. Le temps et l’argent gaspillés par les pouvoirs publics pour voter et/ou mettre en place des lois répressives.
  2. Le coût pour la collectivité d’une restriction de l’accès à la culture.
  3. L’argent gaspillé dans le développement et le test de technologies permettant de brider ou de filtrer l’accès aux contenus (notamment les DRM)
  4. L’argent dépensé dans la chasse aux internautes qui téléchargent, (exemple en France les émoluments de TMG) et dans les procédures judiciaires, etc…

Il s’agit bien entendu d’une liste non exhaustive. Ma conviction est que cette étude, si elle était réalisée à partir d’une méthodologie objective, démontrerait l’existence d’une perte nette pour la collectivité.

Bien entendu, je ne m’attends pas à ce que cette étude soit (en tout cas sérieusement) effectuée. En effet, il serait alors nécessaire d’expliquer aux citoyens pour quelles raisons autant de fonds publics ont été brulés dans des aventures aussi inutiles qu’incertaines, alors même que cet argent aurait pu être affecté à des actions plus utiles à la collectivité (allez soyons un peu démago : donner un toit aux mal-logés par exemple). Les artistes, seraient eux contraints de constater que l’argent indisponible lorsqu’il s’agit de leur accorder une vraie rémunération existe bien quand il s’agit de financer de vaines guerres contre le téléchargement. Téléchargement qui jusqu’ici ne nuit à personne.

Cependant, que cette étude soit disponible ou non, il me parait nécessaire de  rappeler que tout cela, cette gabegie, ne vise qu’à permettre à un nombre réduit d’entreprises (et d’institutions) de refuser de s’adapter à l’ère numérique. Entreprises qui sabotent allègrement l’émergence d’une offre commerciale digne de ce nom. Cela dit à quoi bon prendre des risques et innover quand on est biberonné aux aides d’Etats et au produit de diverses taxes sur la consommation. Oups, je les avais oubliées celles–là… On les met aussi dans le bilan ?